De bonne heure, je me suis fait déposer à Rogny en taxi.
Autoportrait de l’auteur en mulet…
J’ai longé le canal avec mes sacs, en traquant le Loing à l’aide d’IPhiGéNie. Je l’ai trouvé… grillagé.
Tant pis. J’ai contourné l’écluse pour accéder à une mise à l’eau herbeuse repérée plus tôt puis j’ai posé le barda à l’ombre et sorti le gonfleur.
Hop. Fin prêt.
Là dessus : glissade dans l’eau et premiers coups de pagaie. Au revoir, Rogny.
Bonjour canal de Briare.
Toujours suivant les infos cartographiques que me donne ma fidèle IphiGéNie, en accostant par endroits dans les orties, j’ai traqué le Loing. Si proche. Au lieu-dit la Savionnière, par exemple.
Le Loing est bien là, mais pour y accéder, c’est autre chose.
J’ai laissé le kayak attaché sur la berge et j’ai fait cinq cents mètres dans un pré, pour aller voir au bout. Là encore, inaccessible.
J’ai donc repris le canal.
Et j’ai continué de pagayer, absolument seul. Peinard.
Apres quelques kilomètres , je suis arrivé à une succession d’écluses
Le truc avec les écluses, c’est que ce n’est absolument pas conçu pour les kayaks. La sortie de l’embarcation est acrobatique !
Ensuite, il faut contourner en portant le fourbi (gravillons) ou le tirer (gazon). Pfouh.
Puis marcher encore pour trouver un accès à l’eau. Parfois, il y en a…
Parfois, pas du tout.
La technique que j’ai trouvée consiste alors à descendre le canoë à la corde, puis sonder ensuite la profondeur du bord avec la pagaie (environ 80 centimètres), descendre dans l’eau et se hisser dans le kayak en prenant appui sur un boudin et la berge, façon barre parallèle – et constater au passage, navré, un vieillissement certain et grimaçant de ses capacités physiques…
Pour se remettre de tous ces efforts, des aires de pique-nique sont prévues.
Heureusement, car les écluses se multiplient.
J’en ai passé trois comme ça, quatre peut-être, puis soudain : miracle!
Là, en contrebas du chemin de halage : le Loing. Accessible. Zarma.
Nouvelle mise à l’eau sponsorisée par Pinder et enfin! Je navigue sur l’objectif.
Moments de bonheur!
De courte durée. La rivière se resserre.
Impossible d’aller plus loin(g). Je sonde la profondeur à la pagaie : 10 centimètres. Ok. Pied à terre. Et croutch : je pulvérise une fine couche et m’envase dans 60 centimètres de glue putride! Une sorte d’effet macaron, en moins glamour…
Je me hisse sur la berge en m’aidant des tiges d’orties puis je regarde mes jambes et mes pieds.
Bref moment de solitude…
Pourtant, le Loing est encore là, tentant. Mais sa course s’achève sur une bête grille avant le rejoindre le canal.
Fataliste, j’y traîne à mon tour le matériel. Je me rince tant bien que mal dans le canal, franchit un dernier barrage – une jeune femme vêtu d’un polo bleu siglé VNF (Voies Navigables de France), surveille en embuscade un trio de jeunes qui font des salto dans l’eau du bord de son écluse.
J’arrive à Châtillon-Coligny.
Le long du grillage du camping, je dégonfle et plie le kayak…
Puis je vais monter le camp de base.
Douche ensuite, petite lessive, enfilage d’une tenue de soirée (pantalon, tee-shirt sec et baskets) puis je pars en visite de Châtillon Coligny.
Ça commence fort.
On sent que la ville a été belle et opulente. A été. Parce qu’aujourd’hui, c’est le grand désert. Pour un samedi 13 juillet, c’est même étonnamment calme.
Je trouve tout de même à me nourrir – en évitant le Royal Kebab – dans une brasserie dont le patron manie les manivelles de stores à la perceuse.
Puis je rentre en flânant. On dirait que la ville est située dans un vortex temporel. Coincé entre passé actif et présent décrépit.
Beaucoup de maisons ou de commerces y sont fermés. Plus ou moins à vendre. Ici, un ancien temple du design.
Là, une ex-riante taverne.
Tout cela veillé par Antoine César Becquerel, physicien du XIXème siècle natif de Châtillon-Coligny et accessoirement grand père d’Henri – celui de la radioactivité. Je me demande d’ailleurs dans quelle mesure les travaux du petit-fils n’ont pas influencé cette atmosphère de ville morte…
Je regagne lentement le camping, repérant une possible mise à l’eau de demain.
Et je finis cet article dans le soir qui tombe, ici.