J’ai séjourné à bord de l’Ondina durant dix jours lors d’une fabuleuse croisière de plongée que je te raconte dans cet article.
En complément de ce reportage, je te propose ici la description complète de « notre » phinisi indonésien.
Sommaire
S.M.Y signifie Sailing Motor Yacht.
On a davantage navigué au moteur qu’au vent marin, mais l’esthétique des mâts et des haubans est très photogénique.
Et puis le dernier jour, tout de même, l’équipage nous a fait la surprise de sortir les voiles quand on revenait vers Sorong, pour une ultime parade d’adieu. Magnifique.
Histoire de l'Ondina
Ce navire est un phinisi, en langue locale, c’est à dire un bateau traditionnel indonésien fabriqué par une tribu, les bugis, des îles Sulawesi, qui utilisent de l’iron wood et du teck ainsi que les techniques ancestrales apprises et transmises au fil du temps.
L’initiateur de cette construction est un aventurier, plongeur et photographe subaquatique espagnol, Ricard Buxo, pionnier des plongées aux Raja Ampa. Tu en sauras plus sur lui et la construction de l’Ondina en lisant cette présentation disponible ici en PDF.
Ricard s’est associé à son copain Enrique Rubio, et c’est drôle de les voir tous les deux assis sur ce banc, devant le carré, pendant la construction du bateau…
… à l’endroit même où nous nous sommes si souvent retrouvés en fin de journée, pour bavarder…
… dans l’éclairage rasant du soir…
… en profitant de ces couchers de soleil sublimes qu’offre l’Equateur.
Et pour y prendre aussi l’apéritif, évidemment.
Voire même, me concernant, y passer quelques heures en pleine nuit, quand la douleur de la sciatique me chassait de ma couchette et que je ne supportais plus, pour m’allonger, que les lattes de bois dur du banc évoqué plus haut
Le spectacle nocturne à la Gustave le Gray et la navigation berçante compensaient toutefois ces désagréments neuropathiques – qui m’ont à ce point pollué le voyage que je leur ai aussi consacré un article à part.
On visite?
Comme le dit la plaquette de présentation, qu’on trouve dans la cabine avec les instructions pratiques habituelles, l’Ondina est un bateau « conçu par un plongeur, pour les plongeurs ».
C’est très vrai. Dans les espaces techniques, pour commencer.
Le carré arrière est très agréable pour s’équiper. Chaque bloc, numéroté pour la durée de la croisière, est associé à ton scaphandre et à ta stab et reste à la même place, porté par les membres d’équipage pour aller ou revenir des zodiacs.
L’étagère qu’on aperçoit au fond à droite, avec des serviettes bleues roulées, sert à stocker le petit matos perso (téléphone, lunettes, etc.) et possède une multiprise qui permet de recharger les lampes, les flashs, les batteries d’appareils…
Sous le banc de bois, chacun retrouve sa caisse pour les palmes et le lest, par exemple. J’y rangeais aussi mon masque et mon ordi une fois rincés.
Entre chaque plongée, il te suffit juste de raccorder ton premier étage après le regonflage pour signifier que tu repars sur la suivante. Précision : les blocs sont systématiquement gonflés au nitrox 32. Pour une explication technique sur l’oxygène enrichi, clique sur la photo ci-dessous.
Sur le pont arrière, et je n’avais jamais vu ça nulle part, tout un espace est réservé aux photographes!
On peut y démonter son fourbi, le régler, l’essuyer. Il y a même une soufflette reliée à un bloc pour chasser la flotte des caissons et les ouvrir plus vite, ainsi que deux coffres de rinçage emplis d’eau douce. Génial.
On circule par les coursives bâbord ou tribord, où l’on trouve des robinets en double pour se rincer soi-même ou dessaler le petit matériel.
A tribord, un espace sert de douche chaude et d’étendage des combis à l’ombre. Il y a même une baignoire de rinçage supplémentaire, au fond.
Tu te demandes peut-être d’où vient toute cette eau douce? Et bien, c’est de l’eau de mer traitée. La présence des dessalinisateurs sur les bateaux a d’ailleurs changé considérablement le confort, voire la sécurité sanitaire, des croisières plongées. Cet article t’explique comment ça fonctionne.
Où en étions-nous? Ah, oui, la visite. Reprenons.
A bâbord, on accède à l’échelle qui permet de grimper sur le pont supérieur où se trouvent des transats – très agréables la nuit, pour observer les étoiles quand le ciel n’est pas couvert.
Coursives tribord et bâbord ont des drisses à linge qui permettent de faire sécher les maillots et les serviettes au soleil, et permettent aussi, l’une comme l’autre d’accéder au carré où on prend les repas…
… lequel carré est accolé à la cambuse…
… où oeuvre un chef aussi talentueux que réservé que je n’ai pas osé gêner en le prenant en photo.
Dans ce salon, royaume de deux serveurs adorables…
… dans ce salon, disais-je, climatisé, on peut aussi profiter d’un grand écran pour regarder un topo sur l’Archipel présenté par le Directeur de Plongée, Arnaud, ou bien écouter l’exposé géologique pointu d’un passager spécialiste, tel Jean-Claude, ou des sélections de clichés pris le jour même par les différents photographes à bord.
Les cabines
On accède aux couchettes par un escalier raide qui descend depuis la coursive bâbord…
… en bas duquel se trouve le couloir qui dessert les différentes chambrées.
La nôtre, la 5, est spacieuse et agréablement distribuée.
François m’a laissé le grand lit à cause de ma sciatique, et pris la couchette supérieure – ce qui est très généreux de sa part, mais il y a très bien dormi quand même, j’ai des preuves…
La salle de bain est exigüe – WC et douche dans le même espace, ce qui nécessite un peu d’organisation pour ne pas tout inonder.
Cela dit, comme j’étais souvent debout définitivement à 5 heures, avant tout le monde, j’avais pris l’habitude de me doucher sur le pont, dans l’espace dédiée aux combis où l’eau était toujours très chaude. Je n’utilisais notre salle d’eau que pour les « finitions ».
Si notre cabine était confortable, on s’est rendu compte en discutant avec quatre des six femmes parmi les seize passagers – dont Marie-Laure et Maé, qui faisaient partie de la même palanquée que François et moi, que les compartiments qu’elles occupaient au bout du couloir, en avançant vers la proue, étaient beaucoup plus resserrées.
Deux autres plongeuses, Anne-Claire et Dalila, m’ont montré les inconvénients majeurs auxquels elles étaient confrontées : premièrement, le bloc clim’ donnait directement sur la couchette supérieure et la rendait au choix glaciale (on) ou suffocante (off), autant dire inopérante, et deuxièmement, le manque d’espace empêchait de s’habiller ou de déshabiller à deux en même temps. C’était donc très exigu. Sur ce point, les filles l’avaient mauvaise, ce qui se comprend aisément : si leur cabines étaient réduites, elles n’avaient en effet pas bénéficié pour autant d’un tarif proportionnellement diminué!
J’ai trouvé un plan des cabines. Si tu souhaites partir sur l’Ondina : évite donc la 1 ou la 2.
Les plongées
Aucune ne se fait au départ direct du bateau. On accède aux spots grâce aux deux zodiacs du bord, sur lesquels on descend via des échelles de coupée en escalier terminées par une plateforme. Selon la houle ça peut être plus ou moins marrant en matière d’équilibre, mais l’équipage est aux petits soins et les embarquements, et débarquements, se passent généralement bien.
Que l’on plonge aux abords de grandes îles ou au pied d’îlets minuscules, avec ou sans courant, les plongées sont toutes sublimes et très différentes : je te renvoie pour leur détail à l’article qui leur est dédié.
Magie de la navigation
Comme j’ai la chance de ne pas être sensible au mal de mer, j’adore caboter. J’aime jusqu’à l’odeur du diesel et le bruit de ratatouille mécanique du moteur, c’est dire!
J’aime aussi les mouvements du bateau, le tangage d’avant en arrière et ou le roulis, sur le côté, cette espèce de bercement organique et ondulatoire dont l’amplitude dépend de la taille des vagues et de la respiration de la mer.
D’aussi loin que je m’en souvienne, mon corps a toujours intègré ce mouvement d’une façon étonnante, comme s’il était sien, naturel, au point d’ailleurs que de retour à terre, il me faut toujours au moins trois ou quatre jours pour que cesse cette sensation flottante.
Anecdote : quand j’étais jeune ado, j’apprenais le dériveur sur la Seine – j’ai conservé mon livret fédéral de 1980. Tu noteras sur la photo mon goût déjà très affirmé pour la mode des années 40…
Okay : la Seine n’était pas l’Océan, mais les vagues nées du sillage des péniches faisaient tout de même osciller les 420 sur lesquels nous apprenions à dessaler.
Le soir, pour compenser ce curieux ondoiement que mon corps avait gardé en mémoire, je me balançais, à table, sur ma chaise, et je me faisais donc copieusement engueuler par mes parents, lesquels restaient définitivement sourds à cette vague histoire de mal de terre : une légende destinée, selon eux, à justifier l’alcoolisme du marin – arrête ton cirque et finis tes haricots.
Sentence définitive.
Revenons donc au présent, où je tente une photo ratée de la cabine de pilotage.
…. avant de m’allonger à même le bois du pont supérieur, qui me soulage le rachis et où j’aime m’amuser des étoiles qui passent d’un côté du mât, puis de l’autre, illusion d’optique due au roulis, cependant que le bois de l’Ondina craque de toute part.
C’est hypnotique. Et logiquement, comme je suis de plus monté avec oreiller et couverture, je m’endors.
Pour, au sortir de la nuit courte, découvrir les levers de soleil féériques…
… et leurs opposés, de l’autre côté de la journée de plongée, quand le soleil descend et passe sous l’horizon.
En résumé : l’Ondina – un bâtiment magnifique pour des navigations inoubliables!