Dernier relief sur ma route avant la descente vers le Sud, le parc naturel du Pilat me propose aujourd’hui ses montées, que ma trace GPS, cette farceuse, va se charger de corser un peu, et jusqu’à l’arrivée sur Chanas… Je te raconte?
Du fait du changement d’heure, je me réveille tout seul, à 6h00. Je me sens bien reposé par mon dimanche de break. Je profite de l’heure matinale pour être le premier à la douche et au petit déjeuner, puis je prends congé de ma cellule du Formule 1, non sans avoir jeté le coup d’oeil rituel par la fenêtre.
Il ne pleut pas mais tout ça n’est n’est pas très stable.
Je récupère mon vélo dans le local buanderie où l’avait mis le gérant – un très chouette type, prévenant, qui rend l’endroit moins sordide qu’il n’est en réalité – puis je serpente dans la zone industrielle en suivant ma trace GPS verte qui s’affiche sur la carte.
Petite parenthèse à propos de cette trace : je l’ai téléchargée sur le site dont j’ai déjà parlé, France Vélo Tourisme. Mais depuis avant-hier, je me demande s’il elle n’est pas alimentée par des cyclistes qui enregistrent leurs propres itinéraires et les proposent ensuite. Simple supposition. Il y a parfois des choix d’orientation que je ne m’explique pas.
En parlant de France Vélo bidule, voici le dénivelé du jour :
Pas de montées suivies de descentes, puis de remontées pire encore. Là, ça va grimper gentiment jusqu’à plus de 800 mètres. Et ensuite, la dégringolade jusqu’au Rhône!
Mais pour l’instant, repassons au-dessus de l’autoroute.
La trace m’envoie dans un raidillon brutal que bordent des maisons moches.
En haut, déjà en sueur et essoufflé, je vérifie un temps ma direction. Je me méfie des endroits tordus où cette fichue trace verte pourrait m’expédier. Mais non, c’est bien par là.
J’en profite pour observer le brouillard qui englue les crêtes. Je me dis qu’il se pourrait bien, en montant, que je finisse dedans. On verra bien!
Toujours en grimpant, j’arrive à St-Paul-en-Jarez.
Il n’y règne pas une animation folle.
La trace m’indique une minuscule route à prendre sur la gauche. J’hésite, mais en agrandissant la carte, ça me semble cohérent. Allons-y, donc.
Je découvre une chouette piste cyclable, goudronnée, qui longe une rivière ponctuée de petites cascades, le tout dans un environnement automnal qui n’est pas désagréable du tout.
En prenant de la hauteur, je surplombe d’anciens bâtiments industriels qui me font penser aux Cévennes, du côté de la Grand Combe. Cette bâtisse, au second plan, pourrait être une ancienne filature de soie, par exemple.
Je continue la montée, raide mais supportable.
Un coup d’oeil en arrière me permet d’apprécier le dénivelé déjà parcouru.
Je croise des bâtisses austères.
Une ancienne fabrique de tresses et lacets.
Sur une pancarte, je découvre le nom de la rivière : la Dorlay.
Plus haut, j’arrive à la Terrasse sur Dorlay. C’est tout aussi calme qu’en bas.
L’aspect montagnard du village, tout en hauteur, me donne à penser que les choses sérieuses vont commencer, côté grimpette.
Et en effet, dès la sortie du village…
Je mouline péniblement, arc-bouté sur le guidon.
Et je me fais doubler par deux cyclistes casqués, un couple. Ils ont des VTT électriques! Les traîtres!
Je mets pied à terre, écoeuré. Et je mange coup sur coup huit beurrés nantais en regardant les vingt mètres que je viens de monter en soufflant.
Là-dessus, ragaillardi – gloire à Lu – je remonte en selle.
Jusqu’à ce que la route sur laquelle je roulais se transforme en chemin.
Cette foutue trace a remis ça! La carne.
Comme si ça ne montait pas déjà suffisamment dur, la voilà qui me lance sur des trucs d’avant l’asphalte!
Par ricochet associatif, je pense de nouveau aux pionniers du Tour de France, déjà évoqués au début de ce périple, qui sans doute roulaient sur des chemins semblables, sans dérailleur, avec les pneus de rechange croisés sur la poitrine façon Pancho Villa…
Pour leur rendre hommage – et relativiser mon ascension somme toute mineure – je tourne une courte vidéo Pathé.
J’en ricane tout seul…
En haut de ce chemin empierré, je rencontre des chasseurs qui me conseillent de prendre par la départementale.
Tu m’étonnes. D’autant que ça canarde dans les collines. Autant éviter les balles perdues.
La montée est régulière, soutenue mais supportable. Je cale mon souffle sur un rythme à peu près régulier, et je pense à autre chose.
Tout de même, c’est raide. Pfouh.
Mais bientôt, j’atteins enfin les 811 mètres de la Croix de Montvieux – victoire – sous une petite pluie fine qui vire à l’averse glacée.
Je m’abrite sous le porche d’une boutique de ferme. Le type, à l’intérieur, à qui je demande la permission de m’arrêter là pour me changer, me dit qu’il n’y a pas de problème et m’invite à venir goûter ses rhums arrangés. Le pomme-poire est DINGUE.
Il me fait aussi tester des saucissons.
Malin – et très sympathique.
Je repars donc avec un litre de gnôle dans mes fontes et une saucisse sèche, plus deux pommes, offertes.
A partir de ce point, je n’ai plus que de la descente. Un vrai bonheur.
Sauf que la pluie tombe, et pas qu’un peu. Je dois m’arrêter dans le premier virage pour enfiler mon surpantalon.
La buée sur les lunettes n’est pas idéale non plus. M’enfin.
Je dévale, les mains glacées que je n’ai pas couvertes avec mes gants complets, une erreur.
A Pelussin, tout est fermé.
A la sortie, je trouve toutefois un abri à la gloire du Parc du Pilat. J’y fais une petite halte histoire de remettre une couche de chaud sous la veste, enfiler mes chaussettes imperméables et mes gants chauds.
Je finis aussi le paquet de Beurrés Nantais et je mange une pomme.
Puis je débaroule jusqu’à Chavanay, un oeil prudent sur les côtes du Rhône dont les vignes roussies s’alignent sur les collines, l’autre sur la descente à 50 kilomètres heure.
Et à Chavanay…
Le miracle. Un troquet ouvert!
Ahhhh.
Après quoi je finis ma descente jusqu’au Rhône.
Je retrouve une piste cyclable semblable à celles que j’ai empruntées jusqu’à présent, bordée par une route passante.
La pluie, qui s’était arrêtée, repart de plus belle.
Je franchis le pont sur le Rhône en direction de Chanas, dans un paysage industriel que la pluie rend cafardeux…
… puis je suis ma trace qui m’indique comment éviter la Nationale 7 en passant dans une zone industrielle.
Je suis un peu sceptique, d’autant que j’approche de mon hôtel – Campanile, encore une chaîne de bord d’autoroute, je n’ai rien trouvé d’autre – et que sa localisation est précisément en bord de N7.
Mais bon, suivons la trace. Avec la pluie battante, de toute façon, pas facile de manier le téléphone ruisselant.
Evidemment, comme on pouvait s’y attendre, j’atterris sur une piste pourrie qui longe la voie ferrée. Caillouteuse de galets. Bourbeuse d’ornières. Saloperie qui me secoue dans tous les sens cependant que je maudis la trace et ceux qui l’ont faite.
Il y a même – tu le crois, ça? – un passage à gué!
Rien de méchant. 20 centimètres d’eau avec du courant. On s’en fout, j’ai des chaussettes imperméables, non?
Et je bois le calice jusqu’à la boue.
Je trouve le Campanile entre d’autres chaînes d’hôtel et un Courtepaille – c’est fou comme ces zones standardisées et moches se ressemblent toutes, mais ne crachons pas dans la soupe, au moins, je dormirai au sec – et j’utilise ma fidèle corde à linge pour mettre mes affaires à sécher.
Drôles de vacances, tout de même, quand on y pense…
En résumé
Parti de la Grand-Croix à 9h00, je suis arrivé à Chanas à 14h30.
Mon compteur m’annonce 46,77 kilomètres parcourus pour un temps total de pédalage de 2 heures et 58 minutes.
Non mais quand même : 1 L de gnôle dans les sacoches. Tu as encore de la place ou tu as jeté des fringues ? Quel exemple pour la jeunesse… Séquence interdite -18.
Allez roulez ! Y’a rien à boire.
Tu as raison, quelle honte. Et en plus, je roule sans casque. Rien à récupérer !