L’épreuve de vérité5 mn de lecture

La traversée des Monts du Lyonnais, que je m’apprête à te raconter, restera pour moi un épisode d’anthologie des Fantaisies Buissonnières!

Tout voyage, quel qu’il soit, comporte un passage clef. Pas tant celui où le cumul des distances commence à peser sur la fatigue, que ce moment où les difficultés se dressent devant toi et t’amènent, sinon à renoncer, du moins à réfléchir en profondeur à la pertinence de ton entreprise.

Ainsi, dès la sortie de Feurs, alors que des rafales monstres et contraires freinent terriblement mon avancée, le tout dans un paysage de rêve, je me demande VRAIMENT ce que je fous là…

J’ai vécu une rude journée, hier, en raison du dénivelé et du vent, mais franchement, c’était ridicule à côté de ce qui souffle aujourd’hui. Tempête!

Difficile à rendre en photo. J’essaie quand même en cadrant les maïs courbés.

On se croirait sur le littoral breton un jour de grand frais. J’estime la force du vent à environ 60 kilomètres heure, avec des rafales à 80, peut-être même 90.

Et pile en face de ma route, évidemment puisque c’est un vent du sud. Et que je vais au sud.

Quant au dénivelé, voici le graphique du jour :

Je ne l’avais pas bien étudié, hier. J’avais juste noté que j’allais monter 200 mètres supplémentaires au total.

Au début, d’ailleurs, pas de raidillon spectaculaire.

Un interminable faux-plat et de prodigieuses gifles de rafales.

Mais une chouette campagne…

… peuplée de copines.

Je commence à aborder sérieusement la grimpette à Bellegarde en Forez. Sur la carte, les courbes de niveau sont éloquentes.

Juste à la sortie du village, après l’ancienne gare…

… je me tape 800 mètres de montée à 10 ou 11%. Pas humain!

En haut, jolie vue sur le paysage des alentours.

J’aborde ensuite un passage forestier relativement protégé du vent. Heureusement parce que la pente est encore raide.

Passé le virage, ça continue de monter. J’appuie sur les pédales, cuisses en feu, souffle court, dents serrées. Tu parles d’une cure!

Je fais une pause au sommet, où je retrouve le vent. A la croix-rouge, 581 mètres d’altitude, je pense avoir atteint le point culminant du jour. Quel naïf!

Comme je n’ai pas regardé assez attentivement le graphique mentionné plus haut, et que j’ai mis par ailleurs ma carte en mode  1/12000, je ne vois que les courbes qui décroissent à partir de là. Et pas la suite. 

Mais pour l’heure, lançons-nous dans la descente. A 40 kilomètres heure seulement, freiné par le vent.

Magnifique vue sur les collines, qu’éclairent au loin des tâches de soleil. On dirait tout à fait les paysages des Cotswolds britanniques.

Je retrouve un secteur relativement plat, mais soufflé par le zef qui prend des proportions à ce point incroyable qu’il fait siffler les fils électriques qui bordent la route, au-dessus de moi, ou bien les barbelés des champs.

Comme je ne parviens pas à rendre sa violence en photo, je réalise une petite vidéo que je poste sur Facebook – tu la retrouveras à la fin de cet article.

Je contourne Chazelles sur Lyon, passant au bord de fermes ou de pavillons isolés. Partout, toujours le même accueil : les aboiements de clébards crétins qui me chiperaient bien le mollet s’ils n’étaient pas – ce dont je me réjouis – derrière des grilles.

En observant ma trace, à un moment, je m’aperçois qu’elle fait des détours que je trouve inutiles. Je coupe donc tout droit.

Autant que ça serve à quelque chose de rouler à VTT, non?

Et d’ailleurs, en récupérant la trace, elle-même m’envoie descendre par le GR.

Descente amusante et rocailleuse, très typée tout-terrain, où le jeu consiste à éviter de se prendre une gamelle…

… ou bien à se griffer aux ronces.

Pas de gamelle. Mais pour les ronces, raté. Bah, quelques rayures sur l’avant-bras, et donc? 

Au bout de ce sentier, j’arrive à Saint-Denis-sur-Coïse. Il est 13 heures passées, je m’octroie donc une pause saucisson, protégé du vent par un gymnase communal.

Puis je reprends ma raide montée à travers le bled où je découvre… Un troquet ouvert! Avec des gens dedans! Trop tard. Je suis reparti, je n’arrête plus.

En route vers le Montagneux.

Tout ça, bien entendu, toujours avec un vent à décorner les copines, bien en face, parfois latéral – ce qui est moins gênant, sauf quand les rafales me poussent au milieu de la route au passage d’un gros tracteur.

Nouvelle route forestière. Pentue.

Je souffle un peu avant de la grimper, en profitant de la vue aérienne.

Puis je repars. Petit plateau, grand pignon. 6,2 kilomètres heure m’annonce fièrement cet andouille de compteur.

Et j’arrive au Montagneux, enfin! Je discute avec un jeune type en scooter, qui s’est arrêté et me regarde. Je désigne son deux-roues, en souriant :

– On échange?

Il se marre. Me demande d’où je viens. 

– Un peu avant Feurs.

– Ah, quand même! Et ça va avec le vent? Ce matin, c’était la tempête.

A mon tour de rire.

– Ah bon? Pas remarqué.

Sur quoi, nouvelle descente jusqu’au Chambon. Puis une autre montée, fatalement. J’ai regardé les courbes, cette fois. J’atteindrai 799 mètres au Sapin.

J’en bave. Je repense au scooter. Et par association d’idée, à ces vélos électriques à la mode. Pensées impies! Dont je me purge illico au pied d’un calvaire, en me flagellant avec ma chambre à air de secours.

Allez! Courage!

Mais avant le Sapin, je mets pied à terre. Je n’arrive plus à appuyer sur les pédales. Le vent, la pente… Pousser le vélo n’est pas non plus de tout repos. Je sens bien le poids des sacoches, à l’arrière.

Du Sapin, où je me trompe de chemin et monte 30 mètres avant de m’apercevoir de ma bévue, je redescends. Repos bienvenu.

Et j’entame la dernière montée du jour. A pied. Même pas honte.

Encore un effort. La pente s’amenuise. Je remonte sur le vélo et m’enquille sur un chemin qui m’amène à mon point culminant.

831 mètres. Victoire!

Le vent est devenu froid et je suis en sueur. Je passe ma veste de montagne et j’en profite pour immortaliser ce moment avec une nouvelle petite capsule vidéo.

A présent : je n’ai plus que de la descente jusqu’à la Grand-Croix, où je n’ai pas trouvé mieux pour me loger qu’un Formule 1 en lisière d’autoroute.

Je passe mes gants complets et je file sur la départementale déserte. A 55 kilomètres heure.

Avant St-Romain-en-Jarez, je ne comprends plus ce que me fait ma trace GPS : elle m’incite à quitter la départementale pour m’envoyer de nouveau, comme plus haut tout à l’heure, sur des pentes de VTT.

N’importe quoi! J’ai l’impression d’être paumé au milieu de nulle part. Et il est déjà 16h30. D’habitude, à cette heure-là, je suis déjà arrivé et douché… Au lieu de quoi, me voilà traversant des fermes à moitié abandonnées.

De sorte qu’en rejoignant le bas de St-Romain, après avoir photographié ces arbres fruitiers que je trouve magnifiques…

Je ne quitte plus la D65 qui m’amène à Chagnon.

Puis, de Chagnon, j’atteinds les portes de Rive-de-Gier. 

Comme je le disais tout à l’heure, je n’ai pas réussi à trouver d’autre hébergement qu’un Formule 1 – qui, compte-tenu de ma fatigue, fera cependant tout à fait l’affaire.

Mais pour y accéder : gageure!

Finis les monts du Lyonnais : nous voici au pays de l’autoroute reine et de ses abords miteux.

Depuis mon application de réservation hôtelière – Booking, pour ne pas la nommer – j’active l’outil « plans » pour accéder à mon gîte du soir. 

Un merdier! Après avoir tourné en rond dans une espèce de zone industrielle, je ferme « plans » – qui, décidément, ne vaut pas un clou – et je rouvre Iphigénie en mode « état-major », c’est à dire au 1/6250ème. Autant dire, méchamment détaillé.

Je trouve un petit chemin bucolique qui borde un entrepôt…

… puis me fait repasser du bon côté de l’autoroute, par une pittoresque passerelle rouillée, dans un décor post-apocalyptique du meilleur effet..

A 17h30, j’arrive à bon port.

Je réserve une nuit supplémentaire car demain, dimanche, je compte bien me reposer, malgré l’atmosphère étrange qui règne dans cet hôtel, où semble survivre une poignée de déclassés. 

Accessoirement, ça me permettra aussi de ne rédiger l’article du jour que demain.

Je prépare une lessive complète à confier au gérant, plutôt sympa, qui m’a trouvé un local fermé à clef pour mon vélo, puis, douché sur le palier – pas de sanitaire dans la chambre – je file me restaurer chez le voisin.

Parce que c’est ça aussi, l’aventure : un samedi soir au Buffalo Grill de la Grand-Croix!

En résumé

Parti de Naconne samedi matin à 9h00, je suis arrivé à la Grand-Croix à 17h30.

Mon compteur m’annonce 63,82 kilomètres parcourus pour un temps total de pédalage de 5 heures 13 minutes.

Complément vidéo

Comme promis plus haut, voici le petit montage que j’ai réalisé dans le vent, profitant de l’occasion et d’un dimanche chômé pour créer la chaîne Youtube des Fantaisies.

2 réponses sur “L’épreuve de vérité5 mn de lecture

  1. Pour ma part, je ne pourrais pas pédaler ou marcher avec les cheveux longs. Ceux qui me connaissent trouveront cette réflexion crétine puisque je suis chauve… Sinon, comme tous les jours, ce bol d’air que tu nous offres est très agréable, surtout vautré sur un canapé, au chaud…

    1. Merci OBG pour tes commentaires sympas!
      PS : je n’ai pas eu le temps d’aller chez le coiffeur depuis le mois de juin 😬.Trop occupé à faire l’andouille à droite à gauche.

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