L’Odet, l’hiver5 mn de lecture

Profitons de la belle lumière hivernale et du froid solitaire de ces journées de Noël pour aérer le kayak sur ce beau fleuve breton.

En deux temps : en version tranquille à travers les magnifiques vire-courts en aval de Quimper, puis en version marrante via les gorges du Stangala en amont de Quimper, puis à travers la ville de Quimper elle-même pour finir.

Sommaire

L'Odet, version tranquille

Il m’est arrivé plusieurs fois de parcourir les rives de ce fleuve depuis les hauteurs des « vire-courts », ces rivages escarpés qui encadrent le cours d’eau le long de ses méandres en aval de Quimper.

Vues d’en haut, ces gorges sont irrésistibles. Et depuis l’eau? Tentant. Tentons donc, mais de préférence un lendemain de Noël, par un beau temps sec et froid sinon ce n’est pas drôle!

On me dépose à l’aube frisquette à la cale de Rossulien – point de départ choisi pour éviter de parcourir la baie de Kerogan de nuit, en raison des horaires de marée descendante.

Et quelques minutes de rapide gonflage plus tard…

… je file sur l’eau. Solitaire et ravi. 

La brume sur le fleuve, les rivages des gorges, la lune dans le ciel glacé… Un enchantement, tout simplement.

Du fait de la température très basse, les fumées d’échappements rectilignes des avions sont restés figées dans le ciel. Elles y dessinent un quadrillage luminescent aux couleurs de l’aurore. C’est totalement artificiel, mais je trouve ça très beau.

A l’occasion d’une petite pause en marche arrière, je découvre le château de Kerambleiz qui domine les gorges.

A la sortie des « vire-courts », le fleuve s’élargit.

Je songe à cet article récemment paru dans Ouest France : une altercation de poivrots, il y a deux jours, en bordure du fleuve à la sortie de Quimper, a mal tourné. Echauffourée alcoolisée : le ton monte, des baffes, bousculades, une femme tombe dans le fleuve. L’un des protagonistes se jette à l’eau pour la sauver mais il coule illico. La femme, elle, surnage. Son sauveur disparaît au fil de l’Odet.

Je me dis donc que je pourrais bien tomber sur son cadavre, gonflé par la putréfaction, et je lorgne avec une certaine appréhension les morceaux de bois qui flottent entre deux eaux, dont un qui me semble empêtré de quelque chose qui ressemble à des vêtements. Que faire? Et si c’était le gars? Je m’approche, sourcils froncés : mais non. Rien qu’un bout de souche et de vieux chiffons. Ouf.

Post scriptum : Ouest France annoncera dans quelques jours la découverte du macchabée. Ici même, par un autre kayakiste. J’imagine la tête de mon homologue pagayeur à la vue, forcément cauchemardesque, d’un noyé ayant séjourné plusieurs jours dans la flotte. Beurk.

Allez, continuons : porté par la marée, sans effort de pagaie, je me dirige vers une flottille de bateaux ancrés dans le courant.

Un autre château borde l’Odet, Kerouzien.

Je file le long des voiliers.

Alors que je suis – déjà! – en vue du pont de Cornouailles, qui signale au loin mon terminus, je fais durer le plaisir et je remonte à contre-courant un bras du fleuve, sur la droite, qui  se dirige vers Combrit.

Au fond, sur une colline, on distingue encore un château : d’après IphiGéNie, il semble qu’il s’agisse de celui de Keroulin.

Je redescends vers l’Odet, porté par la marée descendante, regardant voler les cormorans, au ras de l’eau, puis je me dirige vers le pont : à gauche, Benodet, à droite, Sainte-Marine.

Je passe sous le pont en croisant les grosses vedettes de l’Odet, navires de plaisance pour l’heure endormis aux corps-morts, puis je distingue la mer à la sortie Benodet.

A ma droite, j’aperçois la cale de Sainte-Marine. Un léger courant retors me chasse de travers mais je m’en sors pas trop mal et je m’échoue sur la rampe de mise à l’eau. Et hop. Même pas mouillé. Sauf les pieds.

Fin de la promenade matinale. Sympa, non?

L'Odet, version marrante

En amont de Quimper, sur le secteur de la commune d’Ergué-Gabéric, l’Odet traverse le Stangala.

Le panneau d’information nous apprend que le Stangala est « une portion tumultueuse du cours de l’Odet » et que là, « le fleuve force le passage vers le sud, la vallée devient encaissée, la pente forme des rapides ».

Hé hé hé… 

Du parking, on accède à la rivière en suivant un joli chemin qui descend entre les arbres et les rochers moussus. Remercions au passage Rémy, qui m’a conduit jusqu’au parking et m’aide à porter le fourbi.

Il y a deux jours, toujours avec Remy, on est déjà venus, mais sur l’autre rive : j’étais intrigué par cette portion du fleuve et je ne savais pas trop trop où je mettais le kayak, du fait de la crue hivernale.

L’eau était haute mais le parcours n’avait pas l’air très compliqué. 

Un peu de jus, ici, mais aucun obstacle et de la visibilité. 

Revenons au bas du parking, sur les berges. La mise à l’eau est idéale. 

Comme je ne sais pas trop à quoi m’attendre, aujourd’hui, j’enfile un gilet et un casque. On ne sait jamais. 

En route vers le bouillon.

Le débit est rapide mais rien de bien impressionnant. Je peux encore faire quelques photos, accroché aux branches pour ne pas filer dans le courant.

Un peu plus loin, la pente s’intensifie. On passe en classe 2.

Descente très agréable : pas d’embâcle, de branche tombée, rien qui ne vienne gâcher la glisse. 

Mon kayak file impeccablement. Sa structure gonflable ondule sur le courant et si j’embarque pas mal d’eau, elle s’évacue instantanément grâce à l’autovidange. Et puis les 5 mm de ma combinaison de plongée me tiennent au chaud. Bref, je m’amuse.

Sur quoi, ça glougloute encore un peu plus, on passe en petite classe 3.

Arrivé au pont depuis lequel j’avais observé le bouillon, il y a trois jours avec Remy, je fais une pause.

La suite n’a pas l’air très complexe, mais je me demande quand même si tout cela est bien raisonnable. Bah! Lançons-nous.

Evidemment : impossible de faire une photo pendant vingt minutes. Je trouve beaucoup plus opportun de rester concentré et de contourner les rochers qui affleurent en pagayant dur.

A un moment, cependant, impossible d’éviter un gros bloc rond. L’espace d’une seconde, je crains le dessalage brutal mais non : le kayak absorbe mollement l’obstacle, l’aileron frotte dans un bruit sourd, la structure gonflable avale la pierre et la digère, puis continue sa course. J’en ricane de soulagement.

Puis la rivière s’apaise un peu et je profite d’une petite zone en crique pour souffler et filmer le courant.

Je me laisse filer un moment puis j’aborde une petite zone de plages herbeuses. Nouvelle pause.

Je regrette de ne pas avoir pris une gourde. J’ai soif, paradoxalement, malgré les paquets d’eau pris dans la figure.

Je jette un coup d’oeil à l’horloge : j’ai mis une heure pour descendre la vallée. Parfait. J’envoie donc un texto de récupération. 16 heures à la sortie de Quimper. Et zou! Retour à l’eau.

Je passe une succession de petits méandres où le courant est encore vif, emplis d’arbres à éviter – ce qui n’est pas toujours possible. Je suis donc content d’avoir gardé mon casque, ça m’évite de me faire peigner à vif!

Puis j’approche de l’agglomération Quimperoise. Je distingue quelques habitations, des ponts routiers sous lesquels je passe en filant…

Sur quoi, je rencontre deux petits ennuis que je n’avais pas prévus et qui me rappellent mes mésaventures sur le Loing. D’abord une passerelle très basse et encombrée de cochonneries. Mais la passe de gauche est libre et je m’y engouffre donc en position allongée. Zou.

Pas compliqué finalement. Quelques centaines de mètres plus loin, en revanche, c’est la galère. La rivière est barrée par des arbres couchés dont les branches entremêlées forment un barrage a priori infranchissable.

Le courant, pourtant si peu spectaculaire en apparence mais dont je mesure la force prodigieuse, drosse mon kayak sur cet entrelacs de branches griffues.

Pagaie inutile. J’empoigne les branches à pleines mains et me hale en pestant de branche en branche. Et ça passe!  J’embarque des feuilles, des brindilles, je me bagarre avec l’obstacle puis je finis par le franchir en disant plein de gros mots.

La rivière retrouve ensuite un visage normal, quoique tristement urbain et ce d’autant que le soleil s’est caché. Je longe la gare. Des promeneurs amusés me font coucou, je leur réponds de la main.

Je poursuis ma route liquide vers le centre de Quimper.

Je passe sous la succession des nombreuses passerelles qui ponctuent le centre-ville.

J’aperçois la cathédrale.

Puis le courant, de nouveau, s’intensifie. Je range le téléphone-appareil photo et me concentre pour ne pas finir bêtement punaisé contre une pile de pont.

A la sortie du centre, je serre à gauche pour éviter la confluence avec le Steir et je longe les parkings en direction de la cale du Stivel, mon terminus et point de ramassage, à l’endroit d’où jadis partaient les navires pour Benodet.

Et voilà le travail. Il ne reste plus qu’à se déshabiller dans le vent glacial, à se sécher, à enfiler des vêtements secs et attendre qu’on vienne me récupérer en voiture, assis sur le kayak dégonflé et plié dans son sac.

Outre la satisfaction amusée d’avoir visité Quimper de façon inhabituelle et ludique, je me réjouis aussi d’avoir pu apprécier le comportement du Safari en eau vive. une bonne journée!

Pour en savoir plus sur l’Odet…

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