Et voilà, toi aussi, tu as à présent bien en tête la chanson de Nino Ferrer. Pas de raison que je sois le seul à l’avoir collée en boucle depuis ce matin. Pabadabadam, pim poum.
Et puis, à mesure de notre avancée, c’est vrai que les paysages, urbains notamment, sont de plus en plus méridionaux. On dirait le sud, en effet.
Allez : en route pour cette dixième et avant-dernière étape!
Ecartons d’abord les rideaux pour voir à quoi le Grand Dehors ressemble ce matin.

Il a plu cette nuit, il fait encore humide et gris, mais ça a l’air de se stabiliser au pas pire. Très bien. Descendons déjeuner en compagnie des deux cyclistes rencontrés hier – je leur ai parlé du blog et ils me font un retour sympa, ce matin, d’autant que l’article sur les Etocs leur a parlé puisqu’ils sont des habitués du Guilvinec – puis faisons nos adieux.
Je pars traquer une boulangerie ouverte, pour y quérir un sandwich.
Je passe devant un super hôtel, avec resto gastronomique. Fermé. Congés annuels.

C’est l’inconvénient principal du voyage automnal – avec le vent et la pluie, bien entendu – les meilleures adresses ne sont pas toujours disponibles.
Ma piaule était correcte cela dit, et j’ai dormi comme un sonneur.
Allez, quittons Charmes sur Rhône en longeant les espaces sportifs. Au loin, sur la Drôme, une incroyable mer de nuage noie le relief.

Je retrouve la Via Rhôna qui me fait passer au-dessus d’une rivière, l’Embroye.

Laquelle se jette dans un nouveau canal dont je ne t’ai pas encore parlé, bien que je l’ai déjà suivi hier avant Valence.
Il s’agit du canal d’Amenée, large miroir du ciel.

En arrière, je contemple la mer d’ouate qui s’accroche toujours aux reliefs drômois.

Je pédale nez au vent, profitant de n’avoir pour une fois mal nulle part, à part à la paume gauche mais c’est supportable.
Et tout à coup je pile des deux freins!
On a frôlé le drame : j’ai failli rouler sur un frère. Je m’excuse à plat ventre, grâce à mon sens inné du mimétisme…

… puis je reprends la route et passe le barrage de la centrale électrique.

La piste m’amène ensuite à faire le tour d’une pointe, prise entre le canal qui se jette dans le Rhône et une rivière assez large, qui coule des monts ardéchois.

En remontant cette rivière pour trouver un passage accessible aux vélos, j’arrive à Beauchastel.

Je franchis l’Eyrieux et repart sur l’autre berge, retrouver le Rhône. Sauvage.

En roulant de nouveau sur les feuilles mortes…

Je pense à la route de briques jaunes, du Magicien d’Oz, et par association libre, mon juke-box mental enclenche « goodbye yellow brick road », d’Elton John.



J’arrive en vue de la Voulte sur Rhône…

… où je m’offre un café en terrasse…

… avant de franchir de nouveau le Rhône sur un chouette pont suspendu.

Rive gauche, la plaine est immense, alluviale.

Alors que rive droite, elle est serrée au pied des parois calcaires de l’Ardèche.

Parfois, je croise des décors de film de zombies. J’aime bien.

Je slalome dans des vergers, où les sillons graphiques des rangs d’échalote – ou de de je-ne-sais quel tubercule, car je ne suis hélas qu’un urbain ignare…

… répondent aux alignements impeccables des peupleraies.

Je franchis une énième fois le Rhône…

… pour traverser Le Pouzin en zigzaguant entre les différents groupes scolaires.

Puis la piste m’amène à travers champs et vergers…

… ou sur une drôle de passerelle suspendue, très « andine »…

… jusqu’à Cruas, que je traverse par les petites rues.

De nouveau sur la piste cyclable, j’aperçois au loin les formations nuageuses typiques des cheminées de refroidissement d’une centrale nucléaire

Celle de Cruas-Meysse, qu’on aperçoit généralement depuis l’autoroute.

Je la contourne, fasciné par la taille des chéminées que, tout comme sur la Loire, je n’avais jamais vues d’aussi près…

… et à la base desquelles des cataractes d’eau circulent, brumisées, dans un vacarme de chutes du Niagara.

Puis je continue sur la Via Rhôna, en me disant que je m’arrêterais bien pour croquer mon sandwich quand je trouverais un banc.
Malheureusement, il n’y en a pas. Et les quelques murets où s’asseoir sont un tantinet humides.

Je pique-nique donc un peu plus loin, avant un passage à gué – encore un – et en bordure d’une voie ferrée désaffectée – encore une.
Puis, déjà, j’arrive à Rochemaure, après avoir été voir son impressionnant barrage de près.

Au bout de la piste, cette peinture sur le mur d’un passage souterrain me fait penser à Jean-Michel et sa remorque.

Je me trouve face à un dilemme.

A gauche, la Via Rhôna et le vieux pont de Rochemaure rénové, avec une incroyable passerelle himalayenne! Et, accessoirement, ma direction pour Montélimar.
Mais à ma droite, Rochemaure certes, mais surtout, au-delà, la ville du Teil, berceau historique des ciments Lafarge, victime d’un séisme en 2019 et sinistrée par la désindustrialisation.
Olivier – dont, pour mémoire, la visite demeure le prétexte de ce voyage – m’en a vanté hier l’atmosphère post-apocalyptique. Ce sont ses mots.
il ne m’en a pas fallu plus pour imaginer aussitôt un mix de Châtillon-Coligny, de Tchernobyl et de Champagne sur Seine. De quoi titiller ma curiosité.
Il n’est encore que 13h20. J’ai abattu mes cinquante premiers kilomètres sans m’en rendre compte. Allez! Faisons le crochet.

Je suis déçu. Certes, on sent que la ville ne va pas très bien. Les commerces de la rue principale sont fermés, ou vétustes, ou déglingués, ou totalement hors du temps. Certains immeubles tiennent avec des étais.

Mais comme il fait soleil, et qu’il y a de plus énormément de circulation, l’endroit ne me fait pas l’effet escompté.
Tant mieux pour ses habitants, évidemment. Et tant pis pour mon imagination qui m’a emporté un pont trop loin.
Il faudra que je revienne, de préférence un dimanche gris et pluvieux. Je prendrai des photos argentiques en noir et blanc, et j’écouterai une intégrale d’Arvo Pärt dans les écouteurs de l’Ipod…

Pour l’heure, je fais demi-tour et redescends, puis remonte, les 5 ou 6 kilomètres qui me ramènent à la Via Rhôna.
Et sa passerelle himalayenne, donc. Aux abords très londoniens.

Mais incontestablement suspendue!

Passer là-dessus à vélo est très drôle. Avec l’eau qui file en-dessous. Très aérien. Génial. Et photogénique en diable.

J’approche à présent de Montélimar.
L’arrivée par la piste cyclable est très différente de ce qu’on en voit d’ordinaire depuis l’autoroute du sud.

Pour échapper aux divers noeuds routiers, je vais chercher un pont suspendu aux fins fonds du canal de dérivation de Montélimar – ainsi que le nomme ma carte.

Je roule ensuite entre les promeneurs, les familles et les gamins, jusqu’au coeur de ville.
Je trouve mon hôtel sur un boulevard qui entoure le centre historique. En passant le portail, je m’amuse d’une plaque apposée au mur, qui proclame fièrement le lieu comme siège du Porsche Club.

J’aime beaucoup l’idée de pénétrer un possible bastion du snobisme automobile local, en chevauchant mon vieux biclou Decathlon, les fringues et les cheveux raides de sueur.
Histoire de marquer le coup, je m’arrête en dérapage dans la cour d’honneur. Sale gosse.

A l’accueil, j’annonce ma réservation en posant mes fontes de selle au sol.
L’hôtesse, charmante et pas bégueule – elle en a vu d’autres – m’abrite mon vélo pour la nuit et me conduit à ma chambre double avec balcon.
La déco est d’un moderne absolu. Mais bon, la bâtisse est du XVIIème, alors…

Et puis la salle d’eau est top.
J’y retrouve un semblant d’apparence humaine puis je pars explorer le centre-ville de Montélimar, qui me fait un peu penser à l’écusson nîmois.

On n’est définitivement plus au nord de la Loire.

Je me promène…




Puis, enfin, je sacrifie à la tradition :

En résumé
Parti de Charmes sur Rhône à 9h00 ce matin, je suis arrivé à Montélimar à 15h15.
Mon compteur m’annonce 72,68 kilomètres parcourus pour un temps total de pédalage de 4 heures et 17 minutes.
C’est fini pour ce soir ? Après la photo des zombies ? Il manque un morceau, non ?…
Hello OBG, c’est parce que je n’avais pas fini et que j’avais oublié de mettre mon brouillon en mode « privé ». A présent, c’est complet. Tu peux y aller!